Marcel Metzger, Histoire de la liturgie eucharistique

Paris, Bayard, 2000, 164 p.

 

Hinweis: Diese Rezension übernehmen wir mit freundlicher Genehmigung aus der Revue de droit canonique (Strasbourg).

 

"Faites ceci en mémoire de moi": la formule de Luc 22, 19 placée comme en exergue dès la première phrase de cette nouvelle production théologique de Marcel Metzger en donne immédiatement la tonalité essentielle. Fidèle à lui-même, l'auteur introduit à l'histoire de la liturgie eucharistique. L'histoire du droit et des institutions se confond ici avec l'histoire de la liturgie dont l'auteur souligne la souplesse et la créativité.

1

Sont indiquées tout d'abord avec la plus grande clarté les conditions d'un savoir historique sur la liturgie eucharistique des premiers siècles à partir des sources qui, malgré la rareté des documents, permettent au moins de reconstituer le cadre des premières liturgies chrétiennes. La bibliographie est succincte et essentielle. Les documents éclairent simplement l'évolution qui conduit aux pratiques eucharistiques actuelles toujours réformables. Cet éclairage suit les grandes étapes d'une histoire liturgique qui procède par approfondissement et sédimentation, du temps de Jésus à notre Église postconciliaire en passant par le temps des apôtres, celui des petites communautés dispersées puis celui du développement de ces communautés après la Paix de l'Église. L'histoire de l'eucharistie est l'histoire d'un réaménagement pastoral qui traverse les siècles.

2

Certains débats théologiques sont dirimés de manière courageuse et conséquente : l'enracinement biblique du thème du repas, communication et communion, en est un bon exemple. Seule, la tradition biblique permet de comprendre le caractère central de la théologie du repas que Jésus emprunte et développe à partir des veines sacerdotales et prophétiques du judaïsme ancien. Le canoniste trouve ici maints arguments dans les discussions exégétiques du texte canonique autour de l'eucharistie aujourd'hui.

3

Au delà de simples questions de vocabulaire, c'est à une compréhension directe et dépouillée des rites eucharistiques que convie la présentation de Marcel Metzger, qui s'adresse tout spécialement aux responsables de l'animation liturgique. Le canoniste dont le métier consiste aussi à assurer les acteurs de la pastorale de la fidélité aux normes éprouvées de l'Église doit ici confronter le texte de la norme au jaillissement incessant de la vie sacramentelle tel qu'il se révèle dans le langage courant de la vie du monde actuel et tel qu'il la provoque au renouvellement. C'est en comprenant mieux comment les hommes des premiers siècles de l'Église se sont organisés pour vivre de la foi au Christ que l'on pourra assumer véritablement une vie chrétienne dans toutes ses dimensions culturelles, politiques et sociales. L'articulation entre les éléments fondamentaux de la messe, parole, chant, fraction du pain, partage, ne vise finalement rien d'autre que la réalisation de la communauté et l'accomplissement de l'Alliance.

4

Sans doute un sujet aussi central donnera-t-il encore matière à bien d'autres développements. Le parcours historique proposé opère un saut étonnant entre un premier point d'aboutissement de la liturgie eucharistique au Concile de Trente et l'apparition avec le Concile Vatican II de la solution des ADAP, que Marcel Metzger légitime tout en la considérant comme provisoire. L'Église se serait-elle endormie sur ses lauriers tout ce temps ? Toujours revient la question de la communauté dont le canoniste ne cessera jamais de réétudier les formes, une question que les chrétiens des derniers siècles avaient malheureusement trop facilement éludée en se polarisant sur des rites annexes et des dévotions individuelles.

5

Jean-Luc Hiebel