Francis Messner et Solange Wydmusch (sous la direction de), Le Droit ecclésial protestant
Strasbourg, Oberlin, 2001, 143 pages.
Hinweis: Diese Rezension übernehmen wir mit freundlicher Genehmigung aus der Revue de droit canonique (Strasbourg).
Francis Messner et Solange Wydmusch publient les actes d'une journée d'étude qui s'est déroulée le 26 mars 1999, relative au droit ecclésial protestant. Un tel travail était nécessaire. Il permet l'accès du grand public à une discipline sur laquelle une grande discrétion était jusqu'alors maintenue. Quelque ouvrages existent en langue allemande. Mais les théologiens protestants et les juristes français se sont généralement désintéressés de ce champ d'étude. |
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Dans son introduction, Francis Messner dresse une typologie des droits internes des religions. On distingue trois types de situations : 1. droit ayant un caractère englobant et universel, régissant tous les domaines de l'État et tendant à se dissoudre dans le droit de l'État (islam) ; 2. droit religieux considéré comme le propre d'une confession (modèle catholique contemporain) ; 3. droit interne apparaissant comme un accessoire par rapport au fonctionnement de la confession religieuse. C'est à cette dernière catégorie que se rattachent les Églises protestantes. Leur droit est " d'abord un instrument visant à organiser un groupement et à solutionner des problèmes concrets, à l'instar des modèles existants pour d'autres groupement intermédiaires dans la société " (p. 10). |
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Solange Wydmusch dresse ensuite une typologie des disciplines protestantes (p. 13-33). La notion même de droit ecclésial est problématique dans le cadre des Églises protestantes, celles-ci ayant entendu rompre avec le droit canonique catholique. Traditionnellement, c'est l'État qui est, pour les calvinistes et pour les luthériens, le législateur de droit commun. Et il le demeure quand existe une Église d'État. Mais, avec la disparition de celle-ci, par exemple en Allemagne après 1918, les Églises sont conduites à exercer plus d'autonomie. Mme Wydmusch précise ce que sont les domaines de compétences de ces collectivités religieuses. Tant chez les réformés que chez les luthériens, le droit ecclésial régit la discipline des sacrements, la structure institutionnelle et le statut des ministres du culte. Toutefois, au sein des traditions évangéliques, il est plus délicat de discerner un véritable ordonnancement juridique : " là, le droit interne n'existe pas, la seule médiation admise en cas de conflit est celle du Saint-Esprit. [...] Le droit interne positif n'existe pas " (p. 32). |
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Hans-Joachim Kiderlen présente le droit ecclésial protestant en Allemagne. Initialement adopté directement par les États, le droit ecclésial protestant s'est autonomisé à partir du xixe siècle, l'autonomie normative ayant été acquise avec la Constitution de Weimar. Toutefois, les Églises protestantes restent très liées aux Länder. En pratique elles " veulent toujours être Volkskirche, c'est-à-dire une Église pour toute la population " (p. 38). En contrepartie, elles admettent facilement l'intervention étatique, ne revendiquant pas le caractère de société parfaite. |
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En Suisse également, bien que l'État garantisse la liberté religieuse et l'autonomie des collectivités religieuses, les Églises réformées restent liées à l'État. Christoph Winzeler rappelle ainsi que " les cantons auxquels la Réformation a laissé son empreinte appliquent encore le principe de la réglementation des églises nationales par le législateur politique " (p. 48). Même lorsque l'Église cantonale est totalement indépendante, elle tend à calquer ses normes internes sur celles du canton (p. 51). |
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Jean-Daniel Roque présente ensuite le droit ecclésial protestante dans les départements de la France de l'intérieur (p. 55-81). Des différences notables existent entre les trois Églises protestantes (Église évangélique luthérienne de France ; Églises réformées évangéliques indépendantes ; Église réformée de France). Mais les principes fondamentaux restent les mêmes. Ainsi, sont distingués d'une part les statuts (qui constituent une réponse aux exigences de la loi de 1905) et d'autre part la Constitution ou discipline. En outre, à l'exception des Églises réformées évangéliques indépendantes, toutes les Églises protestantes ont adopté des textes plus contingents, susceptibles de modification plus aisée : les règlements. Cette diversité des statuts conduit à un risque de contradiction. Jean-Daniel Roque présente également les incidences des dispositions du droit français des religions sur l'organisation des Églises. Il souligne que les associations cultuelles ont dû être distinguées d'autres types d'associations (les traditionnelles diaconies). Enfin, il aborde la question des rapports de système entre le droit ecclésial protestant et le droit d'origine étatique. Il considère ainsi que les dispositions protectrices des droits fondamentaux doivent s'imposer même dans le cadre des rapports intra-ecclésiaux. |
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Jean Volff et Jean-Daniel Birmelé s'intéressent enfin à la situation au regard du droit local des trois départements d'Alsace et de Moselle de l'Église de la Confession d'Augsbourg (p. 83-103). Ils montrent que, dans le cadre du droit étatique, a pu émerger un véritable droit ecclésial. |
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Voilà donc un ouvrage bienvenu, dont il faut souhaiter qu'il incite juristes et théologiens protestants à publier des travaux plus nombreux en droit ecclésial. |
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Emmanuel Tawil